Le grand Ramsès II a été le souverain de l’Egypte pendant la moitié de la XIXe dynastie du fastueux Nouvel Empire. Mais pourquoi est-il considéré comme le plus grand des pharaons ? Et pourquoi est-il toujours une star ?
Un souverain bâtisseur
Lorsqu’il monte sur le trône en -1279, il a l’ambition de restaurer la grandeur de l’Egypte. Pour cela, il érige des bâtiments et des statues à travers tout le pays. Lui qui n’est que le troisième pharaon d’une dynastie récemment parvenue au pouvoir, il cherche ainsi à se connecter au passé prestigieux de la précédente XVIIIe dynastie des prestigieux Amenhotep, Thoutmosis, Hatchepsout, Akhénaton et autres Toutankhamon… En témoigne le temple d’Abou Simbel, ses colosses de façade de plus de 20m de haut, l’autre colosse couché de Memphis, mais aussi le célèbre Ramesséum, temple funéraire situé dans la nécropole thébaine en face de Louxor. Il usurpe les monuments de ses prédécesseurs, en faisant graver son nom sur des temples qu’il n’a pas construit… Force est toutefois de constater que les monuments bâtis sous son règne ne brille pas par leur légèreté ni leur délicatesse…
Un règne opulent
La richesse du règne de Ramsès II se manifeste par l’extraordinaire dimension de sa campagne de construction, la plus importante entreprise par un pharaon. Les temples de Karnak et Abou Simbel font partie des merveilles d’Égypte. Son temple funéraire, le Ramesseum, contenait une énorme bibliothèque de quelque 10 000 rouleaux de papyrus. Pharaon de l’âge d’or, le règne de Ramsès II marque l’apogée et la dernière grande période de prospérité de l’Égypte antique.
Une vie privée agitée
On lui connaît un total de onze épouses officielles, outre Nefertari et Isis-neféret. Il est vrai qu’il y a dedans quatre mariages « diplomatiques » : avec une fille du roi de Babylone, une fille d’un prince syrien et deux filles du roi hittite Hattousili III. Mais il faut y ajouter un grand nombre d’épouses secondaires et de concubines, près de 200, et il engendre pas moins de 126 enfants. Vu sa longévité exceptionnelle, ses principaux enfants (20 au total), ceux qu’il a eus avec ses épouses officielles, sont presque tous morts avant leur père. Un seul réussit à lui succéder, Mérenptah, monté sur le trône à un âge relativement avancé (55 à 60 ans), et dont le Sphinx du Louvre est gravé à son nom.
Ramsès II a eu pour épouse la célèbre Nefertari, sa compagne préférée… Il l’épouse quand il a 15/16 ans, elle en a tout juste 13 ou 14. Il ne deviendra lui-même pharaon qu’à l’âge de 25 ans. Elle meurt très jeune, probablement à 40 ans, entre la 21e et la 34e année du règne de Ramsès. Son époux en éprouvera un grand chagrin, bâtissant pour elle le temple d’Abou Simbel.
Une couleur de cheveux inhabituelle
Originaire d’une famille noble de l’ouest du Delta, il arborait une étincelante chevelure en partie rousse. « Ramsès était en partie rouquin, parce qu’il avait du sang sémite » explique l’égyptologue Christiane Desroches-Noblecourt, dans un podcast France Culture. Pourtant, les porteurs de ces couleurs étaient mal vus à cette époque, car le rouge était la couleur du rouquin Seth, l’assassin d’Osiris, le Satan égyptien… Les cheveux blancs de la momie du roi mort nonagénaire ont été teintés au henné par les embaumeurs.
Une ironie dévastatrice
Les connaissances gynécologiques étant succinctes, le moindre résultat obtenu par le dernier des rebouteux égyptiens suscitait de l’intérêt. Impressionné par la renommée des médecins égyptiens, le roi Hittite Hattousil avait demandé à Ramsès II un remède pour guérir la stérilité de sa sœur. Ramsès lui répondit en riant de bon cœur : « Moi, ton frère, je la connais bien ! Elle aurait seulement cinquante ans ? Jamais de la vie ! Elle en a soixante, c’est évident ! Personne ne peut fabriquer de médicaments lui permettant d’avoir des enfants à cet âge ! Mais naturellement, pour le cas où le dieu-Soleil et le dieu de l’Orage le souhaiteraient, j’enverrai un bon magicien et un bon médecin capables et ils lui prépareront quelques drogues en vue de la procréation ! ».
Le roi de la propagande
Sa célèbre bataille de Qadesh contre les Hittites, la première bataille à être documentée par des sources antiques, est supposée s’être soldée par la victoire des troupes de Ramsès II, aux environs de 1274 av. J.-C. Victoire abondamment documentée lors du règne de Ramsès, gravée sous forme de textes et d’images sur les murs de ses monuments. Mais les historiens considèrent aujourd’hui qu’il s’agit probablement d’un match nul, voire d’une défaite égyptienne déguisée en triomphe personnel par la propagande de Ramsès II. L’absence de sources hittites laissent en effet planer de gros doutes sur l’issue réelle de cette bataille, qui se solde par des pertes territoriales égyptiennes.
Le pharaon de l’Exode ?
Si le nom de Ramsès II résonne encore aujourd’hui, c’est en partie à cause d’un film de Cecil B. DeMille, “Les Dix Commandements” (1956), qui sera le septième plus gros succès de l’Histoire du cinéma. Ramsès II y est incarné par Yul Brynner et présenté comme le Pharaon de l’Exode biblique, qui s’oppose à Moïse. Cecil B. DeMille n’est pas le premier à faire cette interprétation : plusieurs traducteurs de la Bible, puis de nombreux historiens après eux, ont fait de Ramsès II l’oppresseur des Hébreux esclaves. Cette théorie est bien difficile à prouver. Ainsi, aucune des localités mentionnées dans la Bible n’est identifiable à une ville égyptienne. Et le pharaon de l’Exode est censé être submergé par les flots avec son armée lors du passage de la mer Rouge. Or on a bel et bien retrouvé la momie de Ramsès II…
Ramsès, le retour !
L’exposition « Ramsès et l’or des Pharaons » aura lieu du 7 avril au 6 septembre 2023 à la Grande Halle de la Villette, à Paris. L’événement réunira 180 pièces originales, dont certaines ne sont jamais sorties d’Egypte. Bien que l’exposition soit en tournée mondiale, l’exposition « Ramsès et l’or des Pharaons » à Paris sera la seule enrichie du prêt exclusif par l’Egypte du cercueil de Ramsès II. Le sarcophage sortira exceptionnellement d’Égypte, en raison de ses liens avec l’archéologie française, et pour remercier la France d’avoir sauvé la momie de Ramsès II.
En effet, la momie est venue se faire « soigner » au musée de l’Homme à Paris. Une odeur nauséabonde avait averti les conservateurs du musée du Caire que des champignons s’y étaient développés au contact de l’air moderne. Christiane Desroches-Noblecourt proposa son sauvetage grâce à un laboratoire créé pour la momie à l’occasion de son exposition au Grand Palais à Paris. La dépouille de Ramsès le grand fut donc accueillie à Orly le 26 septembre 1976 avec le faste réservé aux chefs d’État : tapis rouge, garde républicaine, et un aréopage conséquents de ministres et d’ambassadeurs !